André Derain, Effets de Soleil sur l'eau - Huile sur toile - 1906 © Adagp, Paris

Magnifique exposition attendue avec impatience. La dernière remonte à 1966. Une peinture qui me touche tellement. L'objet principal de mes reproductions - 3 toiles que j'ai reproduites y sont exposées. Derain, Vlaminck, Marquet, Braque et Matisse, les meilleurs représentants de cette peinture qui fut si éphémère. Je reproche cependant un peu à l'exposition de s'étendre trop sur la peinture européenne de l'époque en marge du Fauvisme : Expressionnistes allemands (2 salles), peinture russe, etc... Certes, l'éclatement de la couleur est un phénomène européen, chaque artiste de chaque pays trouvant ses influences dans la peinture des autres, mais dans ce cas, pourquoi ne pas présenter Van Gogh, Gauguin, etc... Hormis cette restriction, un nombre considérable de toiles réunies, pour ma plus grande satisfaction...

 

Les Fauves

Le terme "Fauve" naît de la plume du critique d'art Louis Vauxelles, a propos des peintres réunis au Salon d'Automne en 1905 : Matisse, Derain, Vlaminck, ainsi que Marquet, Camoin et Manguin. Louis Vauxcelles lance le terme de "Fauves", pour désigner une peinture d'une audace neuve, fondée sur la violence du coloris. Sans manifeste, ni théorie, les peintres fauves partagent le même souci de réinventer l'art et de peindre en construisant le tableau par la couleur. La toile ne décrit plus des paysages ou des personnes, elle est simplement dotée d'une valeur expressive donnée par la couleur. L'appellation "fauvisme", reste assez confuse quand à sa définition. Chaque représentant du mouvement donne sa propre interprétation : pour Matisse, le point de départ du fauvisme a été "le courage de retrouver la pureté des moyens", pour Derain, il a été "I'épreuve du feu".

C'est donc à partir des oeuvres elles-mêmes, que l'exposition témoigne ici du fauvisme en France, et de son écho en Europe, où les échanges sont intenses. L'évolution du fauvisme se confond avec l'éruption d'une modernité, articulée à des cultures et sensibilités spécifiques.
L'exposition suit un parcours chronologique. Elle s'ouvre sur les trois grands représentants du mouvements : Matisse, Derain et Vlaminck, entre 1905 et 1907, et élargit son propos aux différentes figures aussitôt affiliées ou très vite ralliés comme Van Dongen, Braque, Dufy, Friesz...

L'exposition accorde une importante partie aux "Fauves d'Europe", dont les réseaux artistiques de Dresde, Munich, Berlin, Bruxelles, Londres, Prague, Moscou, Budapest, et leurs inter-relations avec Paris. La rétrospective s'achève sur l'évolution de ce genre vers le cubisme et l'abstraction.

L'Histoire

L'émergence du fauvisme remonte à 1905, avec Matisse, Derain et Vlaminck. Les trois artistes s'affranchissent du divisionnisme et du naturalisme par l'orchestration de couleurs pures et arbitraires, qui ne représentent pas forcément des choses.

La peinture se fait alors sous forme de de touches libérées structurant l'espace. Matisse explore plusieurs voies à Collioure : I'une, revisite le mythe de l'âge d'or à travers la fluidité de l'arabesque et de la couleur, I'autre, plus barbare et primitive, s'ouvre à un certain expressionnisme.

A Londres, Derain souhaite refaire de la Tamise autre chose que des photographies en couleurs. Il dissout le motif en le transposant dans des aplats colorés. A Chatou, Vlaminck réunit une suite de paysages d'lle-de-France.

L'Iconographie populaire

La vie moderne et les loisirs sont les thèmes favoris de Raoul Dufy et Marquet...

À travers les thèmes de la rue, des plages de Normandie et des ports, s'ouvre une iconographie plus populaire dans laquelle drapeaux, affiches, vêtements affirment une plasticité nouvelle de l'espace par la couleur.

Entre 1906 et 1908, Braque réalise à l'Estaque une série de paysages marquant son passage, bref mais essentiel, par le fauvisme. Il réalise des oeuvres où la fluidité de la composition renforce l'harmonie des couleurs.

Chez Dufy, les peintures réalisées à l'Estaque constituent le sommet de son oeuvre, dans un rythme syncopé et un dynamisme nouveau des formes et des volumes colorés. Derain évolue lui vers un traitement plus synthétique de la couleur et à une simplification de l'espace et des volumes où s'opère un métissage des sources.

La Couleur

La couleur définit l'essence même du fauvisme. C'est d'ailleurs cette utilisation illimitée de toute la gamme chromatique qui scandalise la critique et les esthètes au Salon d'Automne de 1905.

Cette peinture est qualifiée à l'époque de "barbouillages fulgurants et aveuglants" ou de"mélange de cire à bouteilles et de plumes de perroquet". Ce qui est - à l'époque - inacceptable et "barbare" représente aujourd'hui le mouvement pictural le plus flamboyant et le plus gai à voir.

En Europe, I'usage fauve de la couleur est manifeste, dans le développement cubo-futuriste de Boccioni ou de Malevitch. Le fauvisme de Matisse et de Derain amorce, par l'autonomie donnée à la couleur, le passage à l'abstraction.

L'Europe

Dresde, Munich, Prague, Budapest, Amsterdam, Suisse, Ecosse, Finlande, Belgique, Moscou, St Petersbourg... autant de villes et de pays associés au fauvisme que l'on découvre à travers de très belles oeuvres.

Un regard croisé qui témoigne des influences et tendances qui ont marqué fortement ce moment de l'art moderne.

Chaque artiste - Munch, Kubista, Emil Filla ou encore Kandinsky et Mondrian - accorde aux couleurs une attention particulière. Souvent proche de l'expressionnisme, leurs tableaux évoquent davantage l'émotion et leur propre sensibilité : violence des teintes, puissance lyrique et sensualité des formes.
Cet ensemble d'oeuvres n'est pas situé à part mais bien au coeur de l'exposition. Un passage obligé qui reconsidère le contexte culturelle et géographique de l'époque en accordant une large place à des artistes encore peu connus du grand public.